Notre petit patrimoine :

les croix

 

Tout comme nos églises, nos châteaux, nos monuments ou nos maisons, les croix, les porches, les citernes font partie de notre patrimoine. C'est l'héritage commun, laissé par nos ancêtres, qui plus encore qu'un savoir faire, là où il se trouve, possède une raison d'être.

 

Ainsi les croix, dans leur simplicité telle que nous la connaissons dans notre région, tout comme dans leur richesse comme en témoignent les calvaires bretons, n'ont pas été implantées au hasard. Edifiées là où existaient des cultes anciens, marquant la limite de terroirs, élevées suite à des campagnes d'évangélisation ou en souvenir d'une mort violente, elles jalonnent nos campagnes.

 

A CHARRAS, on en dénombre une bonne dizaine. Mais notre recensement n'a pas force de loi ; vous qui nous lisez, vous en connaissez peut être une qui n'est pas citée, vous avez des éléments sur l'origine de tel ou tel calvaire, vous vous souvenez avoir participé à telle mission… merci de nous communiquer ces renseignements pour enrichir cet article.     

 

Rôle et emplacement des croix

 

1 - Croix de chemins

 

Le premier rôle d'une croix est de christianiser un lieu. Les croix de chemins témoignent donc avant tout de l'avancée du christianisme et de la présence de l'Église. C'est ce qui explique que de nombreux menhirs ont été christianisés par l'adjonction d'une croix. On a dit que les autorités religieuses avaient cherché à détruire ces monuments préchrétiens ; c'est en effet ce que plusieurs conciles ordonnent, mais, le plus souvent, on préféra récupérer ces objets de culte : il suffisait d'en changer la destination.

 

Les croix que l'on trouve aux croisements de nos chemins ruraux, comme des bornages de propriété, sont très anciennes, du plus profond de notre Moyen Age vers la fin du 5ème siècle.

 

Les carrefours ont toujours fait l'objet d'une attention particulière. Il y a, en effet, un symbolisme de la croisée des chemins, et souvent les carrefours provoquent ce que l'on nomme chez nous une "peur". La croix fait donc office ici de talisman. Il ne faut pas négliger pour autant un rôle plus prosaïque d'indicateur : quand le croisement est sous la neige, la croix continue d'indiquer sa position.

 

Certaines croix de chemins sont aussi des croix sur la voie des morts. De la maison du défunt à l'église paroissiale, le convoi funéraire s'arrêtait à toutes les croix et l'on récitait quelques prières appropriées.  

 

"Le signe le plus respectable du culte catholique, l’objet le plus sacré de la religion" est souvent éloigné des habitations et du village, parfois même isolé au milieu des champs. Il est donc exposé à d’éventuelles dégradations. Celles-ci ont été nombreuses pendant la période révolutionnaire. Des calvaires furent brisés, parfois même sous l’ordre des autorités. Ainsi, un arrêté départemental officiel daté du 24 brumaire an VI (novembre 1797), publié à la suite de plantations de croix, stipule que "les agents et adjoints municipaux seront tenus de faire enlever dans la décade de publication du présent arrêté, tous les signes particuliers à un culte quelconque, qui peuvent être fixés ou attachés sur les places et chemins publics, et généralement en quelques lieux que ce soit, de manière à être exposés aux regards des voyeurs".

 

Enfin, à partir du 19ème siècle, de nombreuses croix de chemins sont victimes de l’usure du temps, des intempéries et du vandalisme : par exemple, à la suite des Trois Glorieuses, "dans bien des villages, des bandes organisées, parcourant les campagnes, abattaient partout les croix de mission élevées de 1815 à 1830". Dans le cas où les croix ne seraient pas relevées, la mémoire des villageois, entretenue de génération en génération, garde le souvenir que sur le lieu en question, était auparavant érigé un calvaire. De nombreux lieux-dits peuvent en témoigner. Aussi l’endroit où une croix est plantée est bien souvent consacré par la religion pour plusieurs siècles.

 

2 - Croix des Rogations et de processions

 

D'abord que veut dire "Rogations" ? Dans la religion catholique ce sont les prières publiques et les processions faites pendant les trois jours qui précédent la fête de l'Ascension et la fête de la Saint-Marc (25 avril) pour demander la protection et la bénédiction du ciel pour les récoltes.


 Au printemps, des processions avaient lieu très régulièrement pour bénir les campagnes, les prêtres et moines menaient ces processions. On les retrouve décrites dans les recueils de titres relatifs aux droits temporels d'un monastère ou d'une église (les Cartulaires). L'origine est attribuée à l'Evêque de Vienne, Saint Mamert qui institua ou introduisit en Gaule les prières des Rogations, dans la seconde moitié du 5ème siècle.


Ces processions se font autour de ces points de rendez-vous qu'ont été ces croix. En Languedoc, de nombreuses croix des Rogations subsistent. Les cérémonies ont été poursuivies jusqu'au début du 20ème siècle.


À la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1908, elles seront interdites ! Le gouvernement de Vichy les rétablira... Fin 1944, la Libération de la France impose le retour à la situation d'avant 1940...

 

3 - Croix de Missions

 

A partir du 18ème siècle surtout, les Missions se multiplient dans les paroisses. Là encore, on processionne largement puis, pour fêter dignement la clôture de la Mission, on érige une croix dans un grand concours de foule. 

 

L'histoire des missions

La mission intérieure (ad intra), c'est à dire l'évangélisation locale au cœur de la chrétienté, a été commencée par les grands ordres mendiants : franciscains et dominicains, dès leur fondation au 13ème siècle. Le concile de Trente au 16ème siècle relance l'effort. Saint Charles Borromée commence en ré évangélisant Milan (1565), mais c'est en France que le mouvement sera le plus fort avec Saint Jean Eudes dans l'Ouest de la France (1643), Saint François de Sales en Savoie (1605), Saint Alain de Solminhiac à Cahors, Saint Pierre Fourier en Lorraine (1600), Saint Jean-François Régis dans le Vivarais (1636) et surtout Saint Louis-Marie Grignon de Montfort en Vendée (1705). Les Missions se sont poursuivies jusque vers les années 1950.

 

Les missions aux 19ème et 20ème siècles

Après la tourmente révolutionnaire, il fallut, pour l'Eglise, restaurer la pratique religieuse. Très tôt dans les diocèses on recourut à des missionnaires ; les diocèses se dotèrent d'un corps particulier de prêtres bien choisis dont la tâche était d'aller dans les paroisses, afin de prêcher à nouveau l'Evangile selon les modalités de l'époque. Pendant une période déterminée – une ou deux semaines en général – la paroisse recevait un ou deux prédicateurs et tous les jours des offices particuliers étaient organisés à l’Eglise. Il s’agissait de " raviver" si besoin était la foi des paroissiens, de donner à chacun un regain de pratique religieuse.

 

"Une mission se compose de plusieurs éléments : les cérémonies qui attirent et séduisent, les gloses et les sermons qui éclairent les consciences, enfin, les confessions..."

 

Les Missions sont envoyées dans les paroisses à la demande du desservant. Les prêtres de la Mission, sous la gouverne de l'Evêque, sont envoyés partout où la religion périclite. De cette œuvre divine il ne reste aujourd'hui qu'une croix plantée au dernier jour près de l'église ou ailleurs, pour en conserver le fruit ou tout du moins la mémoire.

 

4 - Croix de limites

 

La croix, comme le menhir avant elle, peut servir de borne. Entrées et sorties des villages sont normalement pourvues d'une croix, mais toutes les limites, religieuses ou profanes, pouvaient être ainsi matérialisées.

 

Aux 11ème et 12ème siècles, des "sauvetés" sont créées et délimitées par des croix (Aurillac, Maurs, Montsalvy, Sauvat). Ces sauvetés sont des terres d'asile qui ne dépendent que du fondateur, Abbé ou Pape. En réalité, il s'agissait ainsi d'attirer des travailleurs pour mettre en valeur des terroirs encore inexploités. Les textes indiquent clairement la présence et le rôle juridique des croix.

 

5 - Croix des villages et des cimetières

 

Chaque village, on l'a dit, s'ouvre et se ferme par des croix (du moins en terre catholique). Mais les places sont également christianisées, ainsi que les cimetières. 

 

Nous savons que les cimetières se trouvaient tous, originellement, à proximité immédiate de l'église. Ce n'est qu'à la fin du 19ème siècle que la nouvelle "morale" de l'hygiène les a rejetés à l'extérieur des bourgs. La croix qui trônait au centre du champ des morts a pu faire le même voyage, ou bien est restée sur place pour devenir une "croix d'église".

 

6 - Croix des ponts, des sommets, des sources et des fontaines

 

Chaque point important du paysage fait l'objet d'une christianisation. Les ponts sont des points de passage obligés, et souvent étaient le lieu d'un péage. Une croix pouvait garantir (en théorie) la légitimité de cet impôt. Malheureusement les ponts anciens sont extrêmement rares aujourd'hui : Saint-Flour, Allanche, Saint-Simon.

Presque tous les sommets, en revanche, ont conservé une croix. Le rôle de christianisation, de signal ou de rappel est ici évident.

 

Enfin, les sources et les fontaines ont également reçu la marque du christianisme. D'abord parce que l'eau a toujours été sacrée, ensuite pour combattre (et en fait récupérer) les cultes antérieurs.

 

7 - Croix mémoriales

 

Pour terminer ce panorama, rappelons qu'un grand nombre de croix servent de témoins. C'est ainsi que les lieux d'une mort brutale, ou au contraire d'un coup de chance, font l'objet d'une érection de croix. Dans le même registre citons les croix de peste, qui rappellent (et conjurent) une épidémie, ou les croix de pèlerinage, qui le plus souvent ne marquent pas une étape sur un trajet, mais rappellent le pèlerinage du donateur. Certaines "croix des batailles" se souviennent seules, et confusément, d'un conflit.

 

                                                                                                                                         

 

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 Les croix de CHARRAS

 

1- La Croix de Besoche

A l'intersection de la route de MAINZAC avec celle allant à La Cave.

Cassée ou volée, elle a été remise en place en 1937 par Mr Chambon, propriétaire du bois attenant

 

 

2- La Croix Blanche

A l'intersection de la route de MAINZAC avec celle de BEAUSSAC est une croix de mission en 1937 comme en témoigne l'inscription. Monsieur Faye se souvient des processions qu'on y faisait avec Monsieur l'Abbé Froidefond.

On suppose qu'elle devait être sur une terre de Vignérias car lors de la vente des terres de Vignérias, le terrain fut récupéré par la Mairie (dixit Madame Ennuyer, ancienne mairesse de CHARRAS)…

 

3- A La Plaigne

En sortie vers le lavoir, Monsieur Faye se rappelle sa mère allant la fleurir.

Démolie avant 1934.

 

4- A l'entrée de la route de "Chez Tourneau"

Monsieur Rougier ne la visualise pas mais sait qu'elle existait puisque, enfant, il entendait dire : "je vais poser les bidons de lait à la croix".

Il existe encore une pierre de 60 cm x 80 cm de côté, épaisse d'une dizaine de centimètres, portant en son centre un trou carré de 10 cm de côté environ, confirmant ces dires et laissant penser que cette croix était en bois.

 

5- Sur le chemin, en bas de la salle polyvalente (Terre des Jartres)

Démolie ou cassée, une croix fut remise par l'un des menuisiers de CHARRAS, à la demande de Madame Chevalier.

 

6- A l'entrée de CHARRAS

En venant d'ANGOULEME, au carrefour avec la route de GRASSAC. De nombreuses photographies illustrent la pose de cette croix de mission vers   l'année 1955, Monsieur l'Abbé Jaouen étant curé de CHARRAS.

Tombée à plusieurs reprises, une nouvelle croix fut érigée, celle que nous connaissons, lors d'une cérémonie avec l'Abbé DEMONTOUX et en présence de l'Evêque d'alors.

 

7- La croix de Saint Marc

Au coude du chemin qui mène au Boucheron.

On ignore tout de son origine et du pourquoi de son nom.

 

8- Au chemin de l'Abbaye

La croix en elle-même a été ôtée de son fût et volée la même nuit que l'a été le poteau d'octroi d'ANGOULEME, son pendant de l'autre côté de la route, dans les années 1990.

Jean-Paul Ennuyer en fit poser une nouvelle le vendredi 6 mars 1992, avec l'aide de Louis et Lucien Tamisier et de Pascal Le Soueff.

 

9- La croix du Grand Nadaud

A l'entrée de la cour de la ferme, un peu perdue dans la végétation.

Cassée pendant la guerre, Léon Chabasse, propriétaire, en rapporta une autre qui fut mise en place par Louis Tamisier.

 

10- A Grosbot

Il y avait autrefois deux calvaires, un dans le hameau, l'autre à la sortie, en direction de ROUGNAC.

Monsieur et Madame Cressent firent ériger une petite croix en haut de leur terrain, en surplomb de la route. Elle provient du cimetière, d'une tombe de la famille de Madame Cressent et fut posée avec l'autorisation de la mairie.

 

11- Au milieu du cimetière

Au croisement des allées du cimetière ancien est dressé un calvaire…

 

12- Au coin de la route qui descend du cimetière

Face à chez Mr et Mme Chessell, il existait une croix, disparue depuis 1971 environ.